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MBTI, Jung, Myers Briggs, psychologie, sciences humaines, tests, individuation
 
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 Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ?

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Protonormal
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Message(#) Sujet: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeVen 04 Juil 2014, 15:33

Bonjour à tous,

Quelqu'un a-t-il lu les écrits des Briggs et serait-il capable de m'expliquer comment est "officiellement" justifié le fait que la tertiaire est de même orientation que la dominante, contrairement à l'auxiliaire ? Une telle explication a bien dû être développée initialement puisque ce point frise la contradiction avec Jung...
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Exil
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeVen 04 Juil 2014, 22:09

Protonormal a écrit:
Quelqu'un a-t-il lu les écrits des Briggs
J'y ai jeté un œil, mais ça vole pas haut. Son livre fondateur du MBTI est une vulgarisation assez approximative, très "scolaire", étayée par des études statistiques plutôt laborieuses. Je doute que tu puisses trouver là dedans des réponses satisfaisantes.

Protonormal a écrit:
comment est "officiellement" justifié le fait que la tertiaire est de même orientation que la dominante, contrairement à l'auxiliaire ?
Sa polarité supposée ne se justifie pas à l'aune de l'orientation dominante, mais en rapport aux propriétés de l'auxiliaire, suivant le même principe qui justifie la complémentarité entre dominante et inférieure, à savoir la lois universelle de l'énantiodromie (trouvaille géniale d'Héraclite, d'inspiration commune au Tao, et concept cher à Jung).

En substance, ce principe révèle que tout ce qui Est tend vers son contraire.
Sur le plan psychologique, Jung illustre ce phénomène par l'apparition d'une contreposition inconsciente visant à compenser l'unilatéralité tendancielle de l'attitude consciente, ceci afin de contraindre le sujet à rediriger un peu de l'énergie qui l'anime vers les aspects antagoniques qu'il tend logiquement à négliger, et se faisant, d'éviter qu'une dissociation névrotique n'entrave l'élan vital.

Or chronologiquement, il arrive un âge (vers l'adolescence) où l'auxiliaire menace de prendre une importance presque aussi prépondérante que la dominante, de sorte que la tertiaire s'active suivant des propriétés fonctionnelles comparables à celles de l'inférieure dans le rapport dialectique qui la lie à la dominante.
Néanmoins, l'auxiliaire demeurant par définition secondaire, l'antagonisme qui l'oppose à la tertiaire est beaucoup plus facile à résorber que l'opposition dominante / inférieure, de même que - concrètement - il est nettement plus facile de relativiser judicieusement les chamailleries de couple lorsqu'on est soi-même en position de tierce personne, que lorsqu'on se trouve viscéralement impliqué dans le clash. Telle est la position avantageuse de la dominante dans son rapport à l'opposition auxiliaire/tertiaire.
Du coup, l'activation inconsciente de cette dernière conditionne une défiance grandissante à l'égard de l'auxiliaire, dont l'exclusivité première (en tant que "bras droit" d'une dominante tyrannique) se voit modérée au profit d'une conscientisation grandissante de la tertiaire, celle-ci pouvant même se différencier au point de devenir pour ainsi dire un second auxiliaire suppléant progressivement aux insuffisances du premier.
                 
Protonormal a écrit:
Une telle explication a bien dû être développée initialement puisque ce point frise la contradiction avec Jung..
Si tu fais allusion à la petite phrase où Jung, négligemment, entre deux bouffées d'inspirations visionnaires, préjuge (sans conviction) que les trois fonctions chapeautées par la dominante devraient être selon toute vraisemblance d'attitude inverse à celle-ci.. alors, il ne s'agit là que d'une contradiction dérisoire que Jung aurait sans doute lui même corrigé si d'aventure il s'était soucier de formaliser rigoureusement sa typologie en adéquation avec les impératifs de l’application pratique (chose dont il n'avait absolument rien à foutre, et que Myers-Briggs se sont chargés de faire longtemps après, dans une tout autre optique que la sienne).

Quand on lit bien Jung (c'est à dire en se mettant à sa place au moment même où il écrit la phrase que l'on lit de lui), il est évident que de son point de vu, la réalité factuelle n'a de valeur que tant qu'elle illustre avec plus ou moins d'adéquation les idées qui l'animent, lui, et que les 500 pages de son pavé fondateur doivent être considérées sous l'angle des quelques idées abstraites qu'il cherchait à véhiculer.  
 
En gros, ce que je veux dire par là, c'est que l'objet de sa motivation, c'était d'illustrer l'idée fondamentale suivant laquelle des types psychologiques préexistent bel est bien, que ceux-ci se distribuent aléatoirement au sein de l'espèce, que l'on peut les modéliser avec plus ou moins de pertinence sous cette forme, qu'ils opèrent au niveau cognitif, et que la totalité des querelles paradigmatiques qui ont jalonné l'histoire de la pensée humaine sont conditionnées par une différence foncière de cet ordre.
Partant de là, il était d'avantage soucieux de transmettre à son lecteur l'inspiration à partir de laquelle la médiation de Jung n'est plus nécessaire, que de proposer un modèle rigoureusement formalisé qu'il s'agirait d'appliquer doctement sur le réel, à la manière des systèmes religieux.

Je suis effaré quand je lis sur wikipédia - énoncé le plus sérieusement du monde - que dans la continuité de cet ouvrage fondateur, trois courants d'interprétation se sont formé à partir de la petite phrase que j'ai commencé par évoquer (ceux pour qui la tertiaire est d'orientation opposée à l'auxiliaire (MBTI), ceux pour qui elle est d'orientation similaire (puristes Jungiens), et ceux qui ne veulent pas se mouiller en supposant qu'elle est ambidextre). Misérables querelles de chapelles, pinailleries stériles... Facepalm 

La vérité, c'est qu'il se contrefoutait de ces détails, de même qu'il était écœuré à l'idée que sa typologie puisse être réduite à un outils de typage des individus, sans parler du fait qu'il s'est très vite désintéressé de ses propres travaux en la matière, se contentant d'en rappeler les grandes lignes.

Par ailleurs, en pionnier qu'il était, sa typologie a surtout valeur d'ébauche et avec du recul, on s’aperçoit que sous l'effet tunnel de son Ni joint à la déductivité machinale de son Ti, il s'est commit dans des extrapolations et des systématisations excessives.
Par exemple, il n'évoque que très marginalement et brièvement la fonction auxiliaire, son interprétation des types étant démesurément centrée sur la dialectique conscient/inconscient, dominante/inférieure, de sorte qu'en négligeant de considérer l'apport de l'axe auxiliaire/tertiaire à sa juste mesure, il tend logiquement à surévaluer l'apport compensateur de l'inférieure, ou plus exactement, à surinvestir l'inférieure du pouvoir de compenser la dominante, au point qu'il en vient à conjecturer la nécessité dialectique d'une mystérieuse "fonction transcendante" pour surmonter un antagonisme si foncièrement constitutif. Je suis plutôt en phase avec lui sur ce dernier point, mais je pense que le mystère dont il pare certains concepts aurait été moins nébuleux s'il avait prit soin de prendre en compte d'avantage de facteurs dans l'interconnexion de l'ensemble (notamment l'axe auxiliaire/tertiaire, que le MBTI a le mérite de "mettre en lumière").

Pour ce qui est de la tertiaire, à ma connaissance, il n'en parle pas spécifiquement, ou de manière indirecte, en l'associant plus ou moins à la marginalité dans laquelle il relègue l'auxiliaire, et en la conceptualisant - me semble t-il - comme une sorte de second auxiliaire (c'est dire son importance).

Au final, son ébauche théorique offre de mettre en œuvre des expériences empiriques qui elles-mêmes démentent sur un certains nombre de points les conjectures auxquelles il s'est livré, parmi lesquelles des assertions parfois machinales, se reposant trop paresseusement sur le discours d'une logique à bout de souffle.
Mais ces inadéquations entre idée et réalité pratique sont tout à fait normales et prévisibles quand on agit en pionnier dans un domaine si abstrait, à moins d'être fils de Dieu.. ou Freud..

J'ajouterai pour finir que j'étais tombé sur un PDF détaillant la méthodologie rigoureusement statistique qui avait été utilisée pour concevoir et améliorer l'un des quelques test officiels en la matière (en l’occurrence, il s'agissait du test de Cauvin&Cailloux, éminents praticiens Français.. Même si, personnellement, je les trouve beaucoup trop "scolaires", insuffisamment inspirés). La question de l'orientation de la tertiaire y était abordée, et ces auteurs concluaient que leur expérience empirique (en tant que praticiens et en tant que concepteurs de test) corroborait dans une large mesure le schéma classique du MBTI, avec la tertiaire d'attitude inverse à celle de l'auxiliaire.


Dernière édition par Exil le Sam 05 Juil 2014, 03:32, édité 1 fois
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeSam 05 Juil 2014, 01:06

Merci Exil d'avoir répondu si complètement. Voilà qui lève bien des doutes.

Jusque là je considérais par défaut un modèle avec usage de plus en plus introverti de l'auxiliaire au fur et à mesure de sa différenciation (chez l'introverti). Il me paraissait logique que, pour être auxiliaire, une fonction devait investir le même champ, de sorte que les objets intérieurs d'un irrationnel, par ex, se mettent à être pesés et jaugés - au lieu d'un modèle où la conscience perçoit d'un côté et juge de l'autre, pour le dire vite. J'en étais à la conclusion que, plus une fonction auxiliaire s'introvertit (chez un introverti), plus la personnalité s'équilibrait entre introversion et extraversion. Ce qui me laissait devant un réseau de rouages plutôt difficile à visualiser. Mais bref, tu m'as convaincu que la séquence de fonctions MBTIesque peut avoir un certain fondement aussi.

Jung parle (dans le paragraphe de récap des rationnels introvertis) d'appliquer le facteur subjectif, de le valoriser. Cela signifie-t-il la désidentification de l'ego et de la dominante, ce qui permet à celle-ci de se retrouver de fait d'aplomb entre le monde intérieur et extérieur dans son usage (l'Introverti utiliserait alors son facteur le plus développé dans le monde extérieur, ou plus exactement, il extravertirait l'usage d'une fonction reposant sur le facteur subjectif, ce qui placerait son moi dans un équilibre entre les deux) ? S'agit-il d'exploiter l'introversion de type pour rendre à ce mécanisme sa place propre à l'individuation (retour de l'énergie vers le Soi) ? Les deux hypothèses reviennent d'ailleurs à une seule, car s'il y a désidentification du Moi et du Soi, alors l'introversion typique (qui, dans son degré exacerbé, est l'égoïsme) n'est plus tournée vers le Moi, bien qu'elle reste le mécanisme d'introversion générale de la psyché.

Autre question sous-jacente: pourquoi Jung dit-il cela pour les rationnels introvertis, et pas pour les irrationnels introvertis par ex ? Les Pi dom n'ont pas les mêmes raisons de valoriser consciemment le facteur subjectif que les Ji dom ? Il dit ailleurs sur les T dom que la pensée, pour être vraiment objective, doit faire justice aux deux facteurs. Donc dans le résultat "idéal" des mécanismes, s'il y a bien une sorte d'ambiversion du Moi, celle-ci passe par l'usage ambiverti d'une même fonction...

Exil a écrit:
Je suis effaré quand je lis sur wikipédia - énoncé le plus sérieusement du monde - que dans la continuité de cet ouvrage fondateur, trois courants d'interprétation se sont formé à partir de la petite phrase...

As-tu la référence stp. ? Sinon ce n'est pas grave.

Merci encore pour ta réponse et désolé si je t'embarque dans des explications très longues...
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeMer 09 Juil 2014, 00:04

Protonormal a écrit:

Jung parle (dans le paragraphe de récap des rationnels introvertis) d'appliquer le facteur subjectif, de le valoriser. Cela signifie-t-il la désidentification de l'ego et de la dominante, ce qui permet à celle-ci de se retrouver de fait d'aplomb entre le monde intérieur et extérieur dans son usage (l'Introverti utiliserait alors son facteur le plus développé dans le monde extérieur, ou plus exactement, il extravertirait l'usage d'une fonction reposant sur le facteur subjectif, ce qui placerait son moi dans un équilibre entre les deux) ? S'agit-il d'exploiter l'introversion de type pour rendre à ce mécanisme sa place propre à l'individuation (retour de l'énergie vers le Soi) ?

Avant tout, il convient de définir de quel sujet et de que objet on parle quand on associe formellement l'extraversion à un intérêt pour l'Objet, et l'introversion à un intérêt pour le Sujet.
L'erreur habituelle est de donner à ces termes une définition extrêmement réductrice, le sujet étant identifié à la subjectivité du Moi et à son arbitraire (préjugé d'inclination objectale), l'objet se confondant quant-à lui avec la platitude et la banalité de la vie quotidienne (préjugé d'inclination subjectale).
Sans doute que cette restriction caricaturale du concept originel s'est opérée sous l'effet d'un empirisme statistique superficiel. En effet, il est vrai que la médiocrité de l'extraverti et de l'introverti moyen prête à confusion et invite à réduire les choses en ce sens. Raison pour laquelle, quand on se propose d’approfondir notre conscience de la psychologie humaine, il s'avère regrettable de tabler exclusivement sur la moyenne, car celle-ci est le domaine, ou bien du cliché déshumanisé, ou bien de la fade indifférenciation. Dans tous les cas, le discernement menace de s'embourber dans la viscosité piégeuse de la médiocrité.
Pour comprendre l'ampleur de la dialectique E/I, il convient au contraire de tabler sur l'exceptionnel; par exemple, en considérant la profondeur et l'intégrité dont atteste certains extravertis, ou bien le pouvoir qu'ont certains introvertis d'exercer une influence retentissante sur le monde extérieur (notamment au niveau des mentalités).    

Partant de là, la complémentarité des deux facteurs apparaît plus distinctement. On commence à comprendre que les sources objectives qui guident l'extraverti et les sources subjectives d'où part l'introverti constituent les deux grandes dimensions de l'Être par rapport auquel le Moi est en position de sentir sa propre fragilité et de cerner sa misérable petitesse, un peu à la manière d'un naufragé solitaire dérivant sur une bouée au centre de l'océan, tridimensionnellement cerclé d'immensités écrasantes. Cependant, ce Moi demeure de la plus haute importance puisqu'il est, pour ainsi dire, le pôle d'émergence dans la conscience, l'instrument indispensable à la saisie réflexive du réel et à la préservation de l'espèce.

Par suite, le plus important, c'est de comprendre que relativement au point de vu de ce Moi limité, le sujet-Soi (profondeurs mystérieuses de l'Être, ou "abysses océaniques" si je file la métaphore) et l'objet-monde (réalité tangible, ou panorama désertique de l'étendue maritime) apparaissent comme deux grandeurs commensurables, deux immensités pareillement vertigineuses. Mais surtout, les deux s'avèrent inaccessibles par voie directe, insaisissable dans leur essence. Elles sont données en tant que phénomène externe (pour l'extraversion) et interne (pour l'introversion), qu'il appartient à la conscience de distinguer et d'ordonner en se différenciant à travers les fonctions de perception et de jugement.

Le plus difficile à concevoir pour nous - occidentaux conditionnés à un paradigme extraverti matérialiste - c'est que l'intériorité des individus n'est pas réductible à un "cul de sac" gorgé de subjectivité et d'arbitraire. Il s'agit là d'un préjugé réductionniste conditionné par la croyance suivant laquelle la tangibilité extérieure est l'unique source possible d'objectivité. Or cette croyance est elle même conditionnée par notre appareil sensoriel, sorte de "no man's land" séparant l'esprit sentant de la matière sentie, et à l'aune duquel on préjuge que ne peut être extérieur au sujet seulement ce qui est présumé extérieur à l'esprit, c'est à dire la matière sur laquelle tâtonne notre entendement, tangibilité qui de fait se voit démesurément assimilée au concept d'objet.
Or il n'est pas nécessaire d'être un shaman pour constater qu'en plongeant son regard psychique dans les profondeurs de l'âme, le "Moi conscient" se retrouve rapidement exposé à une réalité tout aussi étrangère à lui-même que le sont les objets extérieurs. Son intériorité, loin de déboucher sur une "âme poubelle" au fond de laquelle s'entasse des résidus refoulés (dixit Freud), s'ouvre au contraire sur l'introspection "empirique" d'une relative extériorité de plus en plus impersonnelle et archaïque, paysage mental peuplé d’entités autonomes tout aussi dangereuses que des prédateurs concrets relativement à l'intégrité du sujet. C'est à ce niveau de profondeur que Jung situe son concept d'inconscient collectif, et c'est au plus profond de cette matrice qu'il envisage la notion d'archétype, essence insaisissable, sorte d'instinct élevé à la dimension du potentiel cognitif des Sapiens Sapiens, substrat de notre spiritualisation du réel et qui, en tant que tel, peut être raisonnablement défini comme un objet de connaissance intérieur, universellement partageable, complément dialectique des objets extérieurs.

Partant de là, il y aurait donc deux objets (extérieur / intérieur) et l'acte d'objectivité, aussi ultimement qu'il nous est donné de la concevoir, consisterait par conséquent à œuvrer en perspective d'une adéquation optimale entre l'idée d'inspiration subjective (mais objective dans son inaccessible essence) et l'expérience concrète des objets extérieurs (mais subjectifs dans leur représentation phénoménale).
Autrement dit, l'abstraction de concept universel à partir de l'expérience concrète implique l'existence objective d'une disposition intrinsèque à le saisir comme tel (sans quoi, impossible d'envisager la communicabilité des concepts), de même que la représentation spirituelle de l'idée qui préforme nos conceptualisations, pour se rendre intelligible, implique d'être façonnée à partir d'un contenu dérivé de l'expérience objectale.
En résumé, pour optimiser sa compréhension des réalités extérieures, il convient de façonner la synthèse que l'idée intérieure préforme dans notre entendement, de même que pour optimiser sa compréhension de l'idée intérieure (essence purement abstraite), il convient de lui donner forme en la nourrissant du contenu de nos expériences, la réalité objective n'étant atteignable qu'au moyen d'une adéquation harmonieuse entre ces deux facteurs. Est-ce que c'est clair ?..  Razz

Il revient aux deux types fondamentaux de réaliser cette alchimie complexe, et de se rejoindre, complice devant l’éternel, à travers le témoignage vivant de leur aptitude à s'approcher de l'objectivité.
Ceci dit, il convient toute fois de rappeler que l'extraversion d'un I n'est pas la même que celle d'un E, et inversement. Ce que je veux dire, c'est qu'aussi loin que l'introverti pousse sa capacité d'extraversion et d'objectivation, celle ci est conséquence de son introversion première et n'est pas chargée du même rôle ni de la même teneur que l'extraversion d'un E. En effet, il est évident que ni l'objet ni l'idée n'ont le même rôle ni la même signification selon qu'ils sont au point de départ ou à l'arrivée du discours cognitif.

Jung emprunte au philosophe Schiller une formule qui correspond parfaitement à la tâche de l'introverti : "il doit extérioriser tout ce qui est intérieur, et mettre en forme tout ce qui est extérieur". Puis il propose une formule parallèle pour définir la tâche de l'extraverti: "il doit intérioriser tout ce qui est extérieur, et mettre en forme tout ce qui est intérieur".

Pour toutes ces raisons, je considère le concept d'ambiversion comme un contresens (ou une visualisation piégeuse des rapports en question). Je pense que là encore cette représentation confuse procède d'un préjugé conditionné par notre paradigme extraverti, supposant que l'introversion n'existe pratiquement qu'en tant que "défaut d'extraversion" par rapport à une norme donnée. Tel individu serait distinctement catégorisé "introverti" pour la simple raison qu'il s'avère nettement moins extraverti que la moyenne, tandis que tel autre se verrait affublé du qualificatif bancal d'ambiverti parce qu'il est proche de la moyenne scindant les deux groupements. Ça ne veux strictement rien dire en terme Jungien. Cette vision procède d'une conception statistique, tel que l'illustre par exemple une courbe de Gauss, alors qu'il s'agit ici de concevoir une réalité bipolaire suivant une approche dialectique comprise dans un cadre holistique.        

Bref, maintenant, je peux enfin en venir plus spécifiquement à tes questions  Razz  (même si j'ai déjà apporté tous les éléments permettant d'y répondre).
D'après moi, ce que Jung cherche à signifier dans la recap' que tu évoques, c'est que l'introverti, pour échapper à la condition d'esclave auquel le conditionne notre paradigme extraverti, doit assumer le facteur subjectif avec une assurance, une fidélité et une abnégation comparable à celle dont l'extraverti témoigne dans sa relation aux objets extérieurs. En l'absence d'une telle réciprocité, il ne peut que subir l'influence écrasante de ce paradigme hostile à l'épanouissement de ses penchants naturels, le principal symptôme de cette oppression se manifestant au travers sa propension à couver des complexes d'infériorités. L'énergie qu'il déploie pour compenser cette impression de déficience procède d'une entreprise de sape, et l'amène à s'éloigner toujours d'avantage de sa réalité profonde, de sa vocation, de son potentiel de réalisation.

Tous les introvertis que j'ai croisé témoignent d'une mentalité d'opprimé, ça c'est l'évidence quand on veut bien s'avouer la réalité des enjeux à échelle globale. Parmi eux, je remarque deux tendances, ou plus exactement, deux manières de se faire baiser. Je précise d'emblée que ces inclinations ne s'excluent pas mutuellement, pas de manière totale en tout cas, et qu'elles sont l'expression d'une même problématique de fond, mais que la plupart du temps, l'une prédomine manifestement dans l'attitude.

La première, très majoritaire, concerne surtout ceux qui - depuis l'enfance - ont confusément identifié leur sentiment de déficience à un défaut d'extraversion (tel que l'extraverti en témoigne au travers son insertion aisée dans le monde ambiant), et par là même, assimilé la perspective d'un épanouissement futur au développement d'aptitudes d'inspiration extravertie.
Ceux là ont tendance à vivre leur extraversion comme un moyen de décompresser leur insécurité intérieure et de se faire valoir en référence à des normes extérieures, de sorte que leur extraversion procède d'avantage d'un acte de dissimulation que d'une retranscription affirmative du sujet.
Ce positionnement entraîne une discontinuité frappante entre les deux attitudes. Ou bien ils singent l'extraversion dans une sorte d'abandon libérateur, ou bien ils se désolidarisent égoïstement de l'extérieur pour s'absorber unilatéralement dans l'introversion, celle-ci se trouvant réduite à une sorte de refuge secret, de sanatorium intimiste, bref, à une alcôve moelleuse où il se dédommage de la vanité de leur extraversion compensatrice par la vanité d'une introversion devenue elle aussi compensatrice, sans que ni l'une ni l'autre ne profite à qui que ce soit en fin de compte (sauf peut-être à la bonne santé du système et au crédit de leurs oppresseurs..).

L'autre tendance concerne surtout ceux qui - dès leur enfance là encore - ont souvent fait l'expérience du pouvoir de suggestion de l'introversion sur le monde des objets, et acquis très tôt la conviction qu'ils n'ont rien à craindre de l'oppression extérieure tant qu'ils se maintiennent densément dans un état de connexion intense avec la puissance sourde du facteur subjectif.
Ceux là tendent à dédaigner tout emprunt aux normes de l'extraversion (du moins le croient-ils), et à miser presque exclusivement sur leur force de conviction et leur supplément d'âme pour dealer avec les objets extérieurs. Au mieux, on s'accorde à les percevoir comme des personnes intègres, consistantes, douées d'une certaine autorité naturelle (que l'extraverti d'ailleurs peine à expliquer), au pire, on leur reproche leur caractère revêche, dominateur, têtu, et arrogant. En fait, il semblerait que dans le cas auquel je songe, les deux aillent nécessairement de paire.
D'une certaine manière, on pourrait dire qu'ils s'imposent de force dans un monde qui, à leurs yeux, n'existe pas, animés du désir quelque peu mégalo de contraindre les objets extérieurs dans le sens de leur vision idéelle, seule réalité digne de ce nom. Jung traduit cette attitude introvertie en parlant d'une tendance - le plus souvent inavouée - à vouloir surplomber l'objet extérieur depuis la tour d'ivoire où se hisse orgueilleusement le sujet, attitude ressentie tout à la fois comme oppressante et fascinante par l'entourage (dès lors que ce dernier se laisse prendre au jeu des projections que ce rapport opère).
A titre d'exemple illustratif, on peut citer Nietzsche, Baudelaire, Lénine, Ben Laden, ou Végéta.  

Bref, on a là deux variantes d'introverti qui, de part leurs excès respectifs, échouent à s'objectiver, c'est à dire, à transcender l'opposition des contraires. Chacun à leur manière, ils succombent à ce phénomène de surcompensation que Jung résume efficacement en ces termes :  l'art "de transformer en supériorité une infériorité menaçante".
Tout deux tendent à se complaire dans une forme d'introversion viciée, à dilapider leur force en vaines prémunitions contre l'objet oppresseur, et ainsi, à se déposséder de l'énergie nécessaire à la réalisation de Soi (individuation).
J'aime à transposer (grossièrement) cette problématique dans celle plus concrète de la traite négrière, la première tendance pouvant être mise en parallèle avec la figure du "Bounty" (l'esclave zélé, docile, pour qui l’émancipation suppose le blanchissement de son âme) et la seconde avec celle du "Nèg' marron" et autres poursuivants (l'esclave révolté, forcené, pour qui l'émancipation suppose la révolution "contre-suprémaciste" de l'âme noire). Deux figures qui elles aussi, fatalement, ne peuvent qu'échouer à dépasser leur contradiction interne.

Bon, si j'ai éprouvé le besoin de distinguer ces deux catégories, c'est parce que mon point de vu relève presque exclusivement de la seconde, et qu'en fin de compte, me sentant très différent des premiers, il y a tout un pan de l'expérience introvertie (telle que beaucoup en témoigne ici même) que je peine à comprendre de l'intérieur, n'en ayant pour ainsi dire que très peu l'expérience.
Aussi, il est fort probable que les solutions et les optiques qui valent pour un introverti de mon genre ne trouvent que peu d'échos chez d'autres.  
M'enfin, au final, l'introverti qui m'intéresse vraiment, c'est celui qui réussi à se réaliser objectivement dans le respect de sa nature profonde, et celui-ci, je n'en ai pas encore parler. Faut dire que je peine à me le figurer concrètement...

A mon avis, pour se représenter à quoi ressemble un introverti pleinement réalisé dans le cadre d'un paradigme comme le notre, il faut tabler sur l'accomplissement authentique des extravertis les plus individués, puis inverser les termes. Leur processus d'individuation devrait être plus limpide en théorie, puisque non altéré par le parasitage qui accable l'introverti (surcompensation des complexes d'infériorité).

Il s'agirait donc d'un extraverti qui s'est profusément abandonné à l'expérience polymorphe des objets extérieurs sans préjuger de rien à leur égard, et qui a su, dans un second temps, en opérer une synthèse abstraite en parfaite adéquation avec son expérience du monde-objet. Autrement dit, il a su retrouver sous une forme limpide l'idée qu'il avait obscurément projeté dans les objets, et ainsi, il est parvenu à ancré dans sa conscience le lien conceptuel qui unifie en un tout cohérent l'ensemble de ces expériences objectales.
 
Donc, par analogie, l'introverti accompli serait celui qui parvient à s'abandonner à la fascination vivifiante qu'exerce sur lui l'objet intérieur (le fond du sujet) sans succomber à la tentation piégeuse de corrompre le processus à l’œuvre en s'appropriant la valeur de cette source d'inspiration, "détournement de fonds" qu'il s'agit ici de comprendre comme une compulsion égotique visant à redorer une estime personnelle régulièrement mise à mal par l'oppression environnante. L'échouage dans cette voie de garage, c'est ce que Jung appelle "élever le Moi au dessus du sujet",  ou comment s’absorber complaisamment dans une extase dont le contenu n'est d'autre que nous même.

Mais comment déjouer cette compulsion égotique quand on sait la vulnérabilité de l'introverti ?.. Déjà, rappeler que le caractère oppressif des objets extérieurs relève surtout d'une vue de l'esprit, d'une projection de son inconscient. Or cette projection se renforce à mesure que se renforce son système de défense égotique et que s'accentue l'unilatéralité du Moi conscient. D'après Jung, tant que le Moi se maintient sous le sujet en s'y absorbant, la fonction inférieure demeure plus ou moins consciente et prévient tout risque d'inflation égotique en opérant une réduction des fantaisies subjectives.

Néanmoins, cette humilité du Moi face à l'immensité du sujet ne suffit pas à objectiver la conscience sous une forme transcendante. Pour cela, il faut réussir le tour de force d'intensifier le plus profondément possible la saisie du sujet sans que la puissance euphorisante qui s'en dégage ne devienne une affaire d'ego. Tel que je le comprend, pour atteindre à l'objectivation transcendantale, il faut nécessairement intensifier cette tension intérieure jusqu'à atteindre une sorte de climax libérateur. En tout cas, les rares fois où il m'a semblé faire l'expérience d'une objectivation par voies subjectives, j'ai ressenti quelque chose de cet ordre.

Je suppose que dans cet état, l'introverti est habité d'une conscience si puissamment objective qu'elle englobe sa perception toute entière des réalités extérieures, comme si l’immensité de son intériorité débouchait sur une vue aérienne de son environnement extérieure. Dans cet état de "surplomb universaliste", il va de soi qu'il n'a plus rien à craindre des objets externes, l'énergie qui les animait sous un jour menaçant par voie de projection ayant été récupérée au profit de la conscientisation de l'inconscient.                       
 
Protonormal a écrit:
Autre question sous-jacente: pourquoi Jung dit-il cela pour les rationnels introvertis, et pas pour les irrationnels introvertis par ex ? Les Pi dom n'ont pas les mêmes raisons de valoriser consciemment le facteur subjectif que les Ji dom ? Il dit ailleurs sur les T dom que la pensée, pour être vraiment objective, doit faire justice aux deux facteurs. Donc dans le résultat "idéal" des mécanismes, s'il y a bien une sorte d'ambiversion du Moi, celle-ci passe par l'usage ambiverti d'une même fonction...
En ce qui concerne l'ambiversion et le fait de rendre justice au deux facteurs, j'y ai répondu.

Pour ce qui des irrationnels introvertis, leur analyse intervient après le chapitre que Jung consacre aux rationnels introvertis, et probablement que beaucoup de ses commentaires sur les Ji-dom s'appliquent également aux Pi-dom, sans qu'il aie jugé bon de le préciser, peut-être pour éviter les redondances.

Néanmoins, l'une des grandes différences entre ces deux groupements, c'est que - par définition - chez les Pi-dom, le facteur subjectif est expérimenté sous une forme irrationnelle et à des fins irrationnelles, de sorte que dans un premier temps, ils ne sont pas en possibilité de superviser et de contrôler cet ensemble de suggestions intérieures. Ils se laissent déterminer par leurs perceptions sans réussir à distinguer correctement ce qui relève du sujet ou de l'objet. A vrai dire, j'ai l'impression qu'ils s'en foutent un peu pour la plupart..
Tandis que chez les types Ji-dom, l'analyse du jugement permet une distinction plus nette entre les deux facteurs, une conscientisation plus discriminante du contenu. Les Fi-dom par exemple sont hautement conscient du caractère "insulaire" de leurs sentiments.
Peut-être aussi que le jugement, de part sa tendance au contrôle, s'allie plus naturellement avec les propriétés de l'ego, et induit une identification plus consistante entre les deux, là où la perception est trop diffuse pour se laisser ainsi amalgamer.

Protonormal a écrit:
As-tu la référence stp. ? Sinon ce n'est pas grave.

Je crois me souvenir l'avoir lu sur la page générale consacrée, ou bien au MBTI, ou bien à la typologie Jugienne.. Mais là, j'avoue avoir la flemme de chercher.


Dernière édition par Exil le Dim 13 Juil 2014, 00:58, édité 7 fois
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeMer 09 Juil 2014, 00:50

Premièrement, je voudrais te féliciter pour ton accomplissement Exil, placer Nietzsche et Végéta comme deux exemples d'un même comportement, c'est une première.  laughing 

Blague à part, je trouve ton post assez fascinant, notamment parce qu'il se concentre principalement sur les introvertis.

Pour tes deux catégories, ma première intuition, assez réductrice, a été de discerner Ji-dom pour la première et Pi-dom pour la seconde. En effet, d'après mon expérience, les Ni-dom ou Si-dom ont beaucoup plus tendance à "imposer" leur monde intérieur au monde extérieur qu'à se perdre dans une surcompensation intérieure ou extérieure. Au contraire, presque tous les Fi-dom que je connais sont de la première catégorie, et les Ti dom aussi, la plupart avec cette tendance très prononcée à se "perdre" dans leur Ti (ce que tu exprimes comme une surcompensation de l'introversion par rapport à l’agression du paradigme extraverti de la société)

Après, j'ai pleinement conscience que ma perception :
1) n'est qu'une vision extérieure, et donc à la fois biaisée de mon côté de la lentille et incomplète de celui des personnes que je cotoie.
2) peut aussi être liée à mes fréquentations ; je doute d'avoir rencontré tout le spectre de l'introversion. ^^

Ensuite, en ce qui concerne ton introverti "idéal", je crois que mon père, INFJ de son état, fait un bon exemple. On va me dire que j'idéalise mon padre, ce qui n'est pas dénué de sens sans être exact. Introverti qui s'est farci toutes les étapes du travail de gamin dans un village minier paumé dans le désert en Tunisie à directeur informatique chez Arcelor-Mital, en passant par la meilleure école d'ingénieur d'Algérie de l'époque et une émigration pas simple en France.
Mais ce qui me sidère le plus chez lui, c'est sa capacité à "s'extravertir", à défaut d'un meilleur mot. J'veux dire, je suis E, et il est capable d'être bien plus ouvert aux autres, à la fois diplomate et leader, que moi. Je retrouve vraiment cette tendance à accepter totalement ses propres intuitions, son intériorité, tout en existant dans le monde par ce biais. Je crois sincèrement que je ne connais personne qui connaisse mon père sans le respecter, c'est dire.

Bon, je conclus par une question (puisque tu es le grand sage du fofo. Razz )
Penses-tu qu'on puisse séparer les extravertis eux aussi en deux catégories analogues? Je sais bien que la raison d'être de ta première partition est l'imposition de l'extraversion faite par la société moderne, mais juste, je pensais à un truc dans le genre :
-Extravertis qui acceptent totalement leur extraversion, tournés tellement vers l'extérieur qu'ils ont du mal à se retourner sur eux-mêmes.
-Extravertis "modérés", qui se retrouvent ainsi avec un certain poids du paradigme de l'extraversion sur leur tronche. (ENTP 5...  Razz )
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeMer 09 Juil 2014, 19:58

Merci Exil d'avoir pris la peine de développer ta pensée aussi bien, notamment sur les deux traits de la psychologie d'opprimé chez l'introverti. Il reste à définir ce qui distingue vraiment l'introversion saine de ces tendances.

Je suppose qu'à partir du moment où on reconnaît qu'on (le Moi) n'est pas la source créatrice des dynamiques abstraites, mais que ce dernier objet existe malgré nous et de manière autonome, on a déjà une vie d'introverti sinon nirvaniesque, du moins intéressante. Pour que cela marche, il faut reconnaître et sentir sincèrement le sens ou la valeur que met en mouvement cet objet, de sorte que notre intérêt lui soit sincèrement dédié sans pour autant se dénier un intérêt pour le monde extérieur. En quelque sorte, il faut avoir l'intuition que les deux niveaux d'objets (le monde physique et l'abstraction) sont liés, que l'un fait sens grâce et à travers l'autre. C'est du moins comme ça que je le vois. Mes formulations sont peut-être particulièrement caractéristiques de mes fonctions, d'ailleurs. J'espère ne pas trop bidouiller les notions de Jung.

Jung comme von Franz font allusion à la libération de la créativité en conséquence de l'équilibration. L'énergie, dit Jung dans le chapitre sur Schiller, doit pouvoir retourner dans l'inconscient pour faire émerger les contenus qu'elle investit. Ce qui, si je me le représente correctement, revient à dire dans une langue plus simple qu'il faut assumer un intérêt émanant de l'intérieur et la perception/jugement par les voies intérieures. Peut-être que cela n'implique pas le narcissisme si on aspire sciemment à faire l'expérience de l'universel par le subjectif, universel qui par son objectivité est en mesure de fournir une vraie direction à la volonté.

Autrement dit, l'introverti serait sainement impliqué dans le monde extérieur s'il y est impliqué par la voie des idées, et non s'il s'y confronte comme le porteur d'idées idiosyncrasiques qui, parce qu'elles ne sont pas perçues comme une réalité objective, ne peuvent que
1) être imposées dans le monde extérieur qui n'a rien à voir avec elles
2) être abandonnées pour se soumettre à ce monde extérieur
Ce qui rejoint les tendances que tu as dites.

Le rôle de la tertiaire serait-il de résoudre un conflit entre dom et aux ? Un Pi dom développant sa tert commencerait à juger par lui-même de la valeur/cohérence de l'objet intérieur, ce qui fournit une stabilité face aux élans "conformistes" de l'auxiliaire qui n'a que pour critères le monde extérieur. C'est ainsi qu'elle serait dominée et exploitée en tant qu'auxiliaire en tant que telle, comme tu le suggérais dans ton premier message.
Un Ji dom acquerrait une perception plus profonde et idéelle permettant de dépasser la rupture entre l'abstraction toujours surenchérie de la dom et l'extensivité débridée de l'aux ?
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeSam 12 Juil 2014, 22:38

hard a écrit:
Premièrement, je voudrais te féliciter pour ton accomplissement Exil, placer Nietzsche et Végéta comme deux exemples d'un même comportement, c'est une première.  laughing 

Une première pour toi! ^^
Ceux qui me connaissent savent ma promptitude à évoquer Végéta à la moindre occasion favorable, de même que mon goût hétérodoxe pour le mélange des genres. Qu'il s'agisse de Végéta ou de Nietzsche, il y a, dans la visualisation impromptue de leur morgue de mégalo hargneusement constipé, quelque chose que je trouve irrésistiblement comique et qui a le don me rendre dérisoire cette inclination en moi-même. Sans doute que cela touche à la dialectique du grotesque et du sublime, tension tragi-comique à la laquelle je suis particulièrement sensible.
Mais plus sérieusement, je pense vraiment que ces deux là témoignent d'un profil psychologique similaire. D'ailleurs, je les type tout deux INTJ.        

hard a écrit:
Pour tes deux catégories, ma première intuition, assez réductrice, a été de discerner Ji-dom pour la première et Pi-dom pour la seconde.
(...)
Après, j'ai pleinement conscience que ma perception :
1) n'est qu'une vision extérieure, et donc à la fois biaisée de mon côté de la lentille et incomplète de celui des personnes que je cotoie.
2) peut aussi être liée à mes fréquentations ; je doute d'avoir rencontré tout le spectre de l'introversion. ^^

Oui, j'ai aussi fait ce rapprochement en rédigeant, mais sa pertinence se limite à une lecture superficielle des types en question. En situation normale, l'extraversion des IP apparaîtra toujours plus ouverte et accommodante que celle des IJ, qui eux, en raison de leur auxiliaire "Je", paraîtront plus surplombants, aprioriques et coercitifs. Mais ces apparences sont souvent trompeuses car elles invitent à réduire les propriétés de leur intériorité à une vulgaire déduction basée sur leur extériorité, alors que pour rendre justice à leurs prémisses, il convient d'emprunter directement à leur point de vu subjectif sans se laisser abuser par les apparences. Celles-ci ne témoignent distinctement du côté J des IP que lorsque le contexte se prête au débordement de leur inférieure. En dehors de ces épisodes, seule une connaissance très intime du sujet permet d'apprécier à sa juste mesure le primat du jugement.

Bref, il y a peut-être une légère corrélation. Toute fois, j'ai presque autant d'exemple d'IP de la seconde catégorie que de IJ de la première.
Parmi les premiers cités, Jeanne d'Arc (IxFP) me paraît particulièrement représentative.
Mais sans aller chercher aussi loin, sur le fofo, je citerais volontiers le cas de Luna, qui, sous des dehors impressionnables, discrets et anodins, est animée d'un sacré instinct de domination et d'une puissante conviction quant-à l'universalité de son sens apriorique des vérités. En atteste notamment le comportement possessif et tyrannique qu'elle disait avoir avec certaines de ses amies.
A l'inverse, je connais des IJ qui égarent le jugement des moins perspicaces en se donnant des airs affirmés, viables et consistants, mais chez qui il s'agit en vérité d'un emprunt servile aux normes de l'extraversion (versant Je/Pe), et non d'une revendication assurée de l'immanente vérité du sujet (Pi). Leur discontinuité bipolaire et leur difficulté à assumer au grand jour le produit de leur introversion indique clairement qu'ils penchent en faveur de la première catégorie.                

hard a écrit:
Ensuite, en ce qui concerne ton introverti "idéal", je crois que mon père, INFJ de son état, fait un bon exemple.
(...) Ce qui me sidère le plus chez lui, c'est sa capacité à "s'extravertir", à défaut d'un meilleur mot. J'veux dire, je suis E, et il est capable d'être bien plus ouvert aux autres, à la fois diplomate et leader, que moi. Je retrouve vraiment cette tendance à accepter totalement ses propres intuitions, son intériorité, tout en existant dans le monde par ce biais. Je crois sincèrement que je ne connais personne qui connaisse mon père sans le respecter, c'est dire.

Quelle chance tu as...
J'ai énormément de mal à concevoir le simple fait d'avoir des parents N, alors un pater INFJ, cultivé, brillant et accompli, là ça me laisse vertigineusement pantois. C'est tellement aux antipodes de tout ce que j'ai connu..
En tout cas, si sa respectabilité sociale dépasse le cas de figure de l'esclave plébiscité par ses maîtres pour le brio avec lequel il se porte à leur niveau d'entendement, et si, véritablement, son charisme est inexplicable à l'aune de critères extravertis, alors c'est qu'il puise son pouvoir d'objectivation et sa force de suggestion au plus profond de lui-même, dans quel cas il s'agirait bel et bien d'un introverti en voie d'accomplissement.    

hard a écrit:
Penses-tu qu'on puisse séparer les extravertis eux aussi en deux catégories analogues? (...) Je pensais à un truc dans le genre :
-Extravertis qui acceptent totalement leur extraversion, tournés tellement vers l'extérieur qu'ils ont du mal à se retourner sur eux-mêmes.
-Extravertis "modérés", qui se retrouvent ainsi avec un certain poids du paradigme de l'extraversion sur leur tronche. (ENTP 5...  Razz )

Dans la mesure où les types se comprennent dans une globalité d'ordre dialectique, bien sûr qu'un effet miroir s'observe.

Il y a l'extraverti unilatéral, imbu de ses privilèges paradigmatiques, que l'on peut mettre en parallèle avec la figure du bourgeois dont la vision du monde est principalement déterminée par ses intérêts de classe et la nécessité d'en perpétuer les prérogatives. Ceux là participent activement d'un système qui les dispense d'avoir à prendre à leur charge cette basse besogne qu'est l'introversion (relativement aux préjugés extravertis dans lesquels ils ont eu le luxe de pouvoir se complaire). Ils savent d'avance que d'autres, sous la contrainte des rapports d'interdépendance qui structurent le système, se chargent de produire le complément qui les pondérera dans leurs excès.
Naturellement, à moins d'une rédemption miraculeuse, ceux là sont foutus pour l'individuation. Expédies les - individuellement - dans une île desserte ou bien enfermes les dans un monastère Tibétain, et tu verras leur dignité fondre comme neige au soleil pour ne laisser au final qu'une loque miséreuse, objectivement inadaptée au réel, exhortant qu'un improbable sbire l'achève.

Heureusement, il y a des extravertis qui - très tôt et durablement - ont été contraint d'admettre la préciosité du facteur subjectif, certainement sous l'effet de quelques revers traumatisants.
On peut illustrer cela en se figurant un fauve imposant, tout juste adulte, encore épargné par les blessures et imbu de sa supériorité sur la chaîne alimentaire. Seulement, voilà qu'au détour d'un affrontement bref mais intense, un rival chevronné lui inflige une blessure sévère. Aussitôt son instinct lui dicte de claudiquer jusqu'à un endroit feuillue et ombragé où il pourra dissimuler sa faiblesse le temps de recouvrer un minimum d'intégrité physique, si seulement il y parvient. Le voilà donc immobilisé depuis plusieurs heures, douloureusement tapis dans sa cachette, encore très affecté par la soudaineté de ce revirement de situation, puisqu'en une fraction de seconde, il est passé du rôle d'aspirant Roi de la forêt à celui d'une proie facile, et quand bien même il lui peine terriblement de l'admettre, sa douleur est là à chaque instant pour l'en convaincre. Il se retrouve ainsi seul face à lui-même, intensément conscient de la fragilité de son intégrité, et contraint de concentrer toute son attention sur ce que son être profond lui suggère pour espérer rétablir l'équilibre.
Or c'est précisément ça l'introversion, et à fortiori chez l'extraverti, pour qui celle-ci (du fait de la relative inconscience dans laquelle elle baigne ordinairement) est chargée d'une valeur plus intense et signifiante que chez l'introverti (qui lui tend à en gâcher la préciosité à force de se complaire dedans).
En effet, je considère - avec Marie Louise Von Franz - que l'introversion d'un E est plus enviable que celle d'un I, d'avantage porteuse de sens, car elle est en grande part préservée des vicissitudes de l'ego, comme sanctifiée par un parfum d'innocence. Elle a le caractère somptueux des neiges immaculées que l'aurore révèle au pas de nos portes, reflet d'éternité encore vierge du sillage marronnasse de nos routines quotidiennes.

L'inclination d'un individu donné en faveur de l'une ou l'autre des quatre catégories que j'ai décri peut être assez facilement déterminée à l'aune des rapports qui les lient entre elles, et plus exactement, en considération des préjugés que ces rapports activent:

L'introverti inassumé qui singe l'extraverti est souvent apprécié de l'extraverti unilatéral, ou tout du moins agréablement toléré, mais cela évidement avec une bienveillance gorgée de condescendance, relatif mépris dont s’accommode l'introverti dans la logique de son propre déni, quand il ne l'ignore pas tout bonnement.

En revanche, l'extraverti unilatéral se défie de l'introverti forcené, et à juste titre, puisque ce dernier tend à le mépriser de toute son âme, allant même parfois jusqu'à nourrir à son encontre une fureur révolutionnaire qui dans le pire des cas s'achève par une tuerie de masse. A ma connaissance, tous les ados criminellement impliqués dans les carnages auxquels je songe étaient des introvertis de la seconde catégorie, incapable de s'insérer dans le moule, et contraint d'assurer leur survivance au prix d'une identification massive avec la puissance réconfortante du facteur subjectif.  
   
Ces deux variantes d'introvertis ne sont pas tout à fait au diapason. Il est possible que parfois ils s'envient mutuellement, quoique le forcené tend à suspecter sévèrement les compromissions auxquelles consent l'inassumé, et à l'identifier comme un renégat servile.

Par contre, je remarque que les extravertis modérés tendent à s'intéresser aux introvertis forcenés, et même parfois à en être littéralement fascinés, détectant en eux une profondeur et une cohésion interne qui préfigure obscurément la pièce manquante qu'eux même cherchent à retrouver au travers leur processus d'individuation.
C'est très notable par exemple dans l'admiration que le journaliste Frédéric Taddeï (ENFP) voue à l'écrivain Marc Edouard Nabe (INFJ), ou, dans le respect qu'a supposément témoigner Alexandre le grand (ESTP) en allant modestement - mais maladroitement - à la rencontre de ce bourrue de Diogène (ISTP), qui lui l'a envoyé paître du haut de sa tour d'ivoire.
Bon, comme en atteste mon second exemple, cette sympathie n'est pas toujours réciproque dès lors que l'introverti en question se montre démesurément orgueilleux, où que l'extraverti s'avère juste assez modéré pour s'avouer son attrait, mais insuffisamment pour se départir du préjugé voulant que l'adaptation au réel soit nécessairement d'ordre extraverti.
Néanmoins, je remarque une plus grande connivence entre ces deux là qu'entre les deux catégories d'introvertis, raison pour laquelle je tiens à opérer cette distinction.

Enfin, probablement qu'aucun des problèmes que j'ai soulevé ci-dessus ne se pose dès lors qu'on a à faire à un introverti ou à un extraverti exceptionnellement individué. Ceux-là  sont complices dans le témoignage incontestable de leur objectivité et tendent naturellement à conjuguer leurs efforts en vu de compenser la partialité des uns et des autres.

----------------------------------------------------------

Protonormal, ma compréhension concorde en tout point avec ta synthèse, qui reformule succinctement et clairement ce que j'avais auparavant esquissé de manière prolixe.
Il semblerait donc que nous ayons correctement compris ce que nous croyons avoir compris..  Wink 
Maintenant, il s'agira en effet de définir plus exactement les ingrédients de la sanité en la matière. Mais comment y parvenir sans l'expérience intime et persistante de cette justesse?.. C'est tout l'enjeux.


Dernière édition par Exil le Mar 15 Juil 2014, 02:05, édité 2 fois
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeLun 14 Juil 2014, 21:26

Protonormal a écrit:

Le rôle de la tertiaire serait-il de résoudre un conflit entre dom et aux ? Un Pi dom développant sa tert commencerait à juger par lui-même de la valeur/cohérence de l'objet intérieur, ce qui fournit une stabilité face aux élans "conformistes" de l'auxiliaire qui n'a que pour critères le monde extérieur. C'est ainsi qu'elle serait dominée et exploitée en tant qu'auxiliaire en tant que telle, comme tu le suggérais dans ton premier message.
Un Ji dom acquerrait une perception plus profonde et idéelle permettant de dépasser la rupture entre l'abstraction toujours surenchérie de la dom et l'extensivité débridée de l'aux ?

J'avais oublié de réagir à cette question.

Aux réponses que tu suggères, j’adjoins mon acquiescement. C'est sous cet angle que j'avais interprété le phénomène à l’occasion de ce topic.
La seconde partie du dernier message que j'y ai posté devrait apporter de l'eau à ton moulin.
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeMar 15 Juil 2014, 11:35

Merci pour le lien !

Donc on peut considérer que, quand la tertiaire entre en développement, le Moi contrôle à peu près 3 fonctions sur 4. Selon toi la tertiaire entre en développement vers la trentaine comme on le dit souvent ? Ou cela dépend-t-il de l'état de l'aux en fonction sa sollicitation dans le parcours de l'individu, et donc peut varier extrêmement d'un individu à l'autre ?
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Message(#) Sujet: Re: Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Orientation de la tertiaire selon les auteurs du MBTI ? Icon_minitimeVen 18 Juil 2014, 01:35

Protonormal a écrit:

Donc on peut considérer que, quand la tertiaire entre en développement, le Moi contrôle à peu près 3 fonctions sur 4.

Je dirais qu'il n'en contrôle véritablement qu'une ou deux à ce moment précis, mais qu'il lui faut d'ors et déjà composer avec le débat d'un trinôme.

Protonormal a écrit:
Selon toi la tertiaire entre en développement vers la trentaine comme on le dit souvent ? Ou cela dépend-t-il de l'état de l'aux en fonction sa sollicitation dans le parcours de l'individu, et donc peut varier extrêmement d'un individu à l'autre ?

Ça varie grandement.
Le processus d'individuation est absolu dans l'inexorabilité de sa marche vers l'avenir, mais hautement relatif dans son déroulement.
Il y a d'une part le processus telle qu'il se déroule par lui-même, en tant que régulation automatisée, et d'autre part l'action déterminante qu'exerce notre attitude consciente sur son évolution, celle ci pouvant tout aussi bien en faciliter le cours qu'en entraver amèrement l'accomplissement.
Cette attitude est liée notamment aux prédispositions du type, et aux propriétés du rapport qu'il entretient avec l'environnement.

Dans une société comme la notre, le rapport que les I nourrissent avec leur auxiliaire n'est sans doute pas équivalant à celui des E. Certainement que sa différenciation intervient plus précocement et que l'investissement y est plus énergivore.
Maintenant, suivant le type et les contraintes environnementales, cet auxiliaire ne suffit pas toujours à assurer le "minimum de viabilité requis", je pense notamment aux mâles INFJ, dont le Ni est jugé "chelou" et le Fe "efféminé".. Sans doute que ceux là tendent à anticiper la différenciation de leur tertiaire et à en surenchérir l'importance.
A l'inverse, plus un type est favorisé par l'idéologie ambiante, plus il tend à s'unilatéraliser en déléguant au monde le pouvoir et la responsabilité de le modérer. De manière générale, il lui est difficile de prendre la mesure de son propre excès puisque de son point de vu, il est tout ce qui se fait de plus adapté.

Concernant la tertiaire, elle entre en jeux dans le discours cognitif dès que l'auxiliaire atteint un certain  seuil de différenciation, c'est à dire très jeune, mais d'abord de manière brouillonne et relativement inconsciente. Dans l'enfance et l'adolescence, on la devine indirectement comme une potentialité latente. Momentanément, elle peut se montrer très efficiente, mais ne jouit pas encore d'une autonomie propre.
Quand la personnalité inconsciente transparaît dans l'attitude extérieure, elle peut devenir très notable, sans pour autant être différenciée (oui, car la prégnance d'une fonction n'est pas du tout corrélée à son degré de différenciation).

L'âge auquel sa différenciation s’amorce et la netteté avec laquelle celle-ci s’opère sont extrêmement variables, le rythme et l'ampleur de ces réalisations dépendant en grande part du degré de différenciation des deux fonctions principales.
A vrai dire, il semblerait que la plupart des gens se contente d'une différenciation quasi embryonnaire, celle-ci débutant effectivement entre 20 et 35 ans dans la majorité des cas.
De manière générale, moins la personnalité est marquée dans la jeunesse, moins les fonctions tendent à se différencier. La tension qui s'exerce entre elles est insuffisante pour motiver un tel développement. Il y a ainsi des gens de 50 piges à la fois très équilibrés et relativement peu individués, les fonctions principales n'étant pas assez nettement différenciée pour cela.

Sinon, j'observe que la tertiaire intervient souvent de manière décisive dans l'évolution de la personnalité, marquant une rupture notable avec l'attitude habituelle, suffisamment en tout cas pour qu'une différence soit signalée par l'entourage.
En ce qui me concerne, la netteté de cette rupture me permet de situer précisément les signes avant coureurs de sa différenciation à l'âge de 16-17 ans. Alors qu'auparavant il m'était difficile de "dire non", d'assumer ouvertement et posément mon désaccord avec l'objet, j'ai commencé à être nettement plus détaché affectivement et à laisser s'exprimer un jugement critique qui jusqu'alors sévissait en sourdine, sans que je ne parvienne à me le rendre limpide et évident. Du coup on a commencé à s'étonner de cette assurance nouvelle, et du fait qu'au final je devenais beaucoup moins accommodant. Dans le même temps, j'ai véritablement commencé à m'intéresser à des domaines dit "intellectuels", mais ça ne fait que deux ou trois ans que j'ai réellement senti l'amorce d'une différenciation effective, en ce sens qu'à présent je parviens à m'absorber dans une cognition proprement T sans trop subir l'influence du versant NF. C'est encore précaire, mais un palier a clairement été franchi.
J'observe ce même phénomène chez la plupart des types, de manière plus ou moins franche. Par exemple un EFP autrefois très candide, insouciant et capricieux qui devient nettement plus cash, expéditif, décisif et objectiviste, ou un INP qui devient étonnamment "rangé", précautionneux, et discipliné, allant même parfois jusqu'à faire sienne des valeurs traditionnelles que lui-même aurait trouvé réac' et liberticide en vertu du relativisme iconoclaste dans lequel il se complaisait frivolement à l'adolescence.
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