Salut la confrérie,
Après une semaine à solliciter les opinions du Cercle, je vous (me ?) dois bien une présentation.
J'ai passé le test mbti sur 16personnalities il y a quelques années. J'avais été typé INFP, plutôt convaincu. J'avais consulté quelques vidéos sur youtube et je n'avais pas poussé plus loin. Entre-temps je suis tombé sur la chaîne de Pierrick Yah sur le mbti (que je vous recommande) et le discours autour des personnalités me parlait assez, bien que je ne sache rien des fonctions et de toutes les subtilités du mbti. Il y a environ deux semaines je m'y suis plongé sérieusement, avec avidité d'abord, me réfugiant dans un tunnel pour étudier le modèle, en espérant qu'il me guide jusqu'à la lumière. Et puis progressivement mon intérêt décline, et le foisonnement d'informations me décourage d'entreprendre une expertise poussée, et en même temps le modèle montre des signes d'imperfections qui réveillent mon scepticisme, garde-frontière prêt à se barricader. Entre mes mains toutes les étoiles redeviennent poussière.
Je suis si persuadé d'être infp que parfois je soupçonne ceux qui doutent du diagnostique de ne pas en être. Mais peut-être est-ce moi qui suis une caricature. J'aime bien les caricatures. J'aime bien les archétypes. J'aime bien la psychanalyse. Mais à ma sauce seulement.
Un adjectif qui me qualifierait bien : chaotique.
Voilà, maintenant que je suis excusé de tenir une présentation décousue sans queue ni tête je peux naviguer en toute quiétude.
J'ai envie de parler de Dieu. J'aime Dieu, j'aime les Dieux, j'aime la mythologie, un réservoir sans fond de romantisme et de récits épiques. J'ai horreur de la religion, même si elle a une histoire diablement intéressante.
Je conçois un peu Dieu (le monothéiste barbu qui bronze sur un nuage) à la manière des prophètes et d'Albert Cohen (il m'a bien inspiré ce salaud), comme un paternel un peu irresponsable, incorrigible et magnifique, qui regarde sa progéniture avec désolation, une larme inavouée au coin de l’œil quand il détourne la tête avec un rictus désolé alors que j'essaye d'obtenir des explications, roulé en boule dans un coin du noyau terrestre.
En bon Fi-Ne, j'agglomère un tas d'idées, de concepts et d'inspiration, sans me soucier d'être fidèle à la source, pour remodeler tout ça dans un produit cohérent pour moi. Le concept de mort programmée des Dieux dans la mythologie nordique est le saint graal de la tragédie qui émeut mes synapses.
Je suis capable d'apprécier intellectuellement une peinture, mais émotionnellement c'est plus la photographie qui va m'ébranler. Quand il s'agit d'arts visuels, je suis plus terre à terre. Les jeux des ombres et des lumières, qui luttent pour la domination de l'autre, comme des chats entremêlés, ça me parle. Les lumières des lampadaires qui jaillissent indécises d'une mer de brouillard dans la nuit. Des néons tremblotants déformés par la pluie des grands gratte-ciels illuminés, comme les représentations préférées des villes des films de science-fiction.
J'aime la beauté des visages et des corps. La beauté d'un visage de femme peut sauver ma journée. J'ai l'impression que Dieu, dans sa négligence à façonner un monde pour se distraire, a quand même eu le bon goût de parsemer son oeuvre de visages merveilleux. J'ai toujours un regard d'enfant intrigué et émerveillé devant la beauté humaine. C'est étrange, à croire que je la considère comme une anomalie. En tout cas c'est désaltérant. Suis-je superficiel à m'attacher à la beauté extérieure ?
J'aime les mots et leur articulation. J'aime leur musicalité. Je crois que les auteurs que je préfère sont tous infp. (Je me demande si tout le monde préfère les auteurs de son type ?) Je ressens comme un agacement quand le style n'est pas assez emprunt de sentimentalisme. Presque comme une trahison. Les plus beaux écrits qui manquent de l'air exalté d'un Dostoïevski me laissent sur ma faim (lui me frustre par le manque de sensualité dans ses récits). Ah je suis compliqué.
J'aime imaginer une histoire romanesque pour chaque personne que je rencontre dans laquelle je lis un potentiel. J'ai peur que leur contact prolongé n'effrite le mythe que j'ai conçu pour eux. Peut-être une des raisons pour lesquelles je me montre en retrait dans les relations.
J'ai une très bonne relation avec mes parents. Presque fusionnelle. Parfois je considère mon père comme une extension de moi, une marionnette que je fais jouer pour confronter mes opinions et faire mûrir mes avis. Mes avis sont versatiles comme la pluie. Mes convictions sont l'équivalent de glaçons en plein soleil. Je suis ouvert à tous les champs d'exploration de la pensée, j'aime réfléchir, mais tout ça ne compte pas. J'arrive toujours à la conclusion que la logique ne fait germer que plus de questions, jusqu'à questionner des prémisses qui se révèlent être des dogmes. Les pensées peuvent changer le monde, les actions aussi, mais le monde finit par balayer une partie des forts et une partie plus importante des faibles, et sa moisson est aveugle. Alors j'arrête de penser et je laisse agir ma subjectivité, butiner la beauté et les fleurs de l'imaginaire, qui me semble alors moins fatidique que cette réalité.
La relation enfant-parent est celle qui me bouleverse le plus. Pour cette idée je suis prêt à briser la façade de mon insensibilité et à lester des larmes de mon corps boursouflé. Parfois je me perds dans les spéculations et je suis effrayé d'imaginer mes parents survivre à ma mort. Je ne peux concevoir leur douleur, cette idée me tétanise.
J'ai eu une belle enfance, je n'ai pas été marqué en apparence par de violents traumatismes, pourtant le spectre de la mort traîne à mes côtés comme un banquier qui s'attend à récupérer son investissement. À force on s'est lié d'amitiés. Je conçois donc le monde avec cette double polarité passion-mort. Le goût du tragique. Tout ce qui est beau doit revêtir à mes yeux quelque chose de profondément désespéré.
Bon allez quelque chose de doux pour conclure. J'aime les animaux. Avec eux il y a cette facilité de contact qui se passe de malentendus, de masques sociaux, de désir intéressé et de tous les facteurs qui rendent la socialisation humaine problématique. Ok, ok, on avait dit doux, mais récemment j'ai commencé à me questionner sur le réel ressenti des chats. Après tout quelle vie pour eux ? On les a dénaturé, on les a transformé en mobilier. Quel sens reste-il à leur vie dans une Utopie où tous leurs besoins sont comblés par des forces extérieures ? Où est la quête ? On en parle pas assez, de l'enfer de chats. (Les chiens en revanche sont trop cons pour subir ce genre de crise existentielle)
Ça y est je suis vidé et je ne trouve plus rien à ajouter, tant pis pour la note positive. Comme vous le voyez, la subjectivité et le prisme des valeurs esthétiques sont mes guides sur le sentier des interactions avec la matrice. Là où j'adore qu'on raisonne logiquement et avec rigueur pour le plaisir de la joute philosophique de la pause goûter, j'ai horreur qu'on en fasse l'assise de nos jugements sur le monde (j'espère avoir bien illustré le duo Fi-Ne). Je ne peux pas avaler (cette pilule rouge) que les gens tiennent sur les sujets qui comptent pour eux des discours détachés de tout émotionnel. Est-ce pour ça que l'on peut se sentir si isolé, incompris ?
Voilà, je ne sais pas si ça compte pour une présentation, mais peu importe. Comme souvent, le prétexte importe peu, seul compte d'extérioriser et de vomir la mélasse bouillante qui engorge le cerveau.
P.S : Je crois que jusqu'à présent tous mes messages contenaient un post-scriptum, alors pourquoi ne pas en faire ma signature ? Comme d'autres infp l'ont clamé par-ci par-là, fuir la banalité est un impératif inscrit dans nos gènes. Voilà, ça n'a absolument aucun rapport, mais le post-scriptum sera ma manière de terrasser la banalité. Mettons que la banalité est le silence après le point final. Je révoque le point final. Quoi que l'éternité est presque plus angoissante